Statistique inférentielle et psychométrie appliquée
Cette grande leçon introduit la statistique inférentielle et la psychométrie appliquée, ceci dans la perspective de permettre aux étudiants de comprendre les enjeux épistémologiques, scientifiques et techniques de ces matières. Ces enjeux comprennent en particulier la mise au point de méthodes objectives pour l’étude de la variabilité induite expérimentalement ou observée en condition naturelle.
Cette leçon est essentielle pour comprendre les suivantes, car tous les concepts de base de la statistique inférentielle y sont expliqués.
4. Mesurage : logique et usage
4.5. Mesurage psychologique et irrationnalité
Notre point de départ consistait à exiger l'absence d'incohérence logique dans la démarche scientifique, en particulier dans la démarche du mesurage d'une grandeur psychologique. L'exemple de l'étude de Rioux et Mokoukolo (2004) sur l'attachement au quartier des adolescents nous a permis d'identifier trois types d'incohérence logique et la promulgation de leur dénégation via une doctrine méthodologique devenue internationalement dominante depuis la fin de la moitié du XXe siècle (e.g., Danziger, 1990 ; Lamiell, 2003) :
- la dénégation de l'impossibilité logique de mesurer une grandeur subjective,
- la dénégation du caractère qualitatif et non ordinal de l'espace d'échantillonnage, utilisé à pleine puissance pour décrire les personnes et ensuite remplacé par un autre espace d'échantillonnage composé de scores,
- la dénégation des différences individuelles qui existent entre les personnes regroupées sous une catégorie et leur remplacement par la description, nécessairement partielle, du type qui les subsume.
Cette triple dénégation n'est pas gratuite. Elle permet de maintenir, en dépit des difficultés soulevées, le projet de mesurer des grandeurs psychologiques. Une telle attitude pourrait être décrite dans une perspective psychanalytique comme la dénégation du principe de réalité. Curieusement, un argument souvent opposé à la critique que nous avons développée est qu'il n'est pas réaliste de renoncer à la méthodologie mise en œuvre, de manière exemplaire, par Rioux et Mokounkolo (2004). Mais ce réalisme-là n'a pas grand-chose à voir avec l'éthique de la connaissance scientifique, qui refuse en particulier la toute puissance d'un utilitarisme dont les fondements ne sont pas toujours explicites (cf. Canguilhem, 1958).
Il est clairement réaliste de développer une science des réponses aux questionnaires psychologiques, si tant est que les questionnaires psychologiques constituent un mode d'objectivation privilégié en psychologie. Et il est parfaitement réaliste de considérer qu'une science empirique est par définition une science des phénomènes empiriques auxquels elle sait accéder (qu'elle sait décrire).
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