La science : entre connaissance et incertitude

Objectif. Montrer comment la Statistique a pu prendre sa place dans le paysage des sciences.

Prérequis. Aucun.

Résumé. Avec le développement des sciences empiriques, les sciences sont passées d'une perspective où la connaissance était constituée de certitudes absolues exclusivement basées sur l'exercice de la raison, à une perspective où l'incertitude inhérente au monde matériel est acceptée

rédaction : Éric Raufaste.

3. Réconcilier connaissance et incertitude : Le calcul des chances

Naissance de l'approche mathématique de l'incertitude

Bien que l'on pense maintenant que l'univers est plus probablement intrinsèquement indéterministe, il reste que dans notre vie quotidienne de nombreuses choses surviennent de façon prévisible. Notre ignorance n'est donc que partielle. De fait, bien avant Laplace, des mathématiciens se sont demandés comment prévoir le cours d'événements dont l'issue semble intrinsèquement incertaine. Au premier rang figurent Blaise Pascal et Pierre-Henri de Fermat, dont la correspondance qu'ils ont entretenue à partir de 1654 peut être considéré comme la véritable fondation de la théorie mathématique des probabilités.

Le problème qu'ils avaient à traiter est de formulation très simple : si deux joueurs sont interrompus au milieu d'un jeu de hasard à un moment où l'issue de la partie est peu claire, comment doit-on partager l'enjeu ?

Pascal est aussi très connu pour son célèbre " pari " dans lequel il soutient que les enjeux d'une vie éternelle associée à l'existence de Dieu (éternité de plaisir au paradis ou de souffrances au paradis) rend dérisoire les enjeux terrestres (s'adonner ou non aux plaisirs libertins) et que donc il vaut mieux ne tenir compte que des options associées à l'existence de Dieu. On voit qu'ici l'incertitude est donnée de manière très qualitative. Elle n'est pas quantifiée. Le raisonnement porte plutôt sur les quantités de plaisir et déplaisir en jeu, ce qu'on appellera plus tard les "utilités". Mais c'est tout de même l'ignorance de la réalité d'une situation qui fonde le problème.

À partir de là vont se développer des travaux visant à traduire en langage formel les prédictions que l'on peut dériver d'éléments de connaissance partiels : le calcul des chances, qui s'appellera plus tard calcul des probabilités.


La théorie de l'information ou la réconciliation de Fortuna et Sapientia

Plus récemment, le lien entre connaissance et incertitude va prendre un nouveau jour avec les travaux du mathématicien américain Claude Shannon. Ce dernier va en effet formuler une définition formelle de l'information en termes de probabilités. À partir de ce moment, la révolution des sciences cognitives va pouvoir prendre place. La connaissance est maintenant conçue comme de l'information stockée, et l'information elle-même est conçue comme une réduction de l'incertitude...