5. Classer des candidats

5.1. Le problème

Les tests psychologiques sont parfois utilisés pour classer des candidats lorsqu'on ne dispose pas d'un critère de classement. L'idée générale est que plus un candidat a une performance élevée au test, mieux il doit être classé. Si les performances aux tests sont décrites dans un format vectoriel, il n'est a priori pas garanti que les candidats puissent être classés, c'est-à-dire placés dans un ordre simple. La méthode usuelle consiste à calculer un score psychométrique, et les candidats sont alors classés en fonction de leur score (avec d'éventuels ex aequo). Lorsque les candidats sont décrits par plusieurs scores, la méthode usuelle consiste à calculer une somme pondérée des scores (on dit aussi une combinaison linéaire des scores). Les candidats sont alors classés en fonction de leur somme.

Le problème qui se pose est que les pondérations d'une combinaison linéaire des scores n'ont pas de signification opératoire claire. Par conséquent, le classement obtenu à l'aide d'une combinaison linéaire donnée n'est pas meilleur que le classement qui serait obtenu avec une autre combinaison linéaire. Comment choisir la "bonne" combinaison linéaire ? Nous allons exposer une méthode de classement fondée sur une interprétation ordinale des scores, qui permet d'éviter l'utilisation d'une combinaison linéaire.

Auparavant, il faut comprendre ce qui se passe et nous allons utiliser un exemple. Paul a obtenu les scores x A = 1,5 au test A et x B = -0,5 au test B, tandis que Julie a obtenu les scores y A = 1 et y B = 0,3. Ces scores sont considérés comme des mesures d'intervalle, c'est-à-dire qu'on considère qu'on sait mesurer la distance entre deux scores au même test. Savoir mesurer la distance entre deux scores signifie que n'importe quelle transformation affine positive des scores est valable (voir l'article Échelles de mesure).

Multiplions les scores au test A par la valeur strictement positive a, et ajoutons la valeur b. La différence entre les scores de Paul et Julie à ce test est multipliée par a (a est factorisé et b s'annule). Les différences entre scores mesurés sur une échelle d'intervalle sont mesurées sur une échelle de rapport. En effet, le rapport de deux différences ne change pas, quelles que soient les valeurs a et b qu'on utilise lorsqu'on applique une transformation affine positive (i.e., a > 0) aux scores du test.

Les pondérations qu'on introduit dans la combinaison linéaire des scores sont donc arbitraires du point de vue de la signification psychométrique des scores, puisqu'elles sont des transformations affines positives. Mais elles ne sont pas sans effet sur les classements. Par exemple, si on compare la somme des scores de Paul et celle de Julie, Paul obtient 1 et Julie obtient 1,3, donc Julie est "meilleure". Mais si on double les scores au test A, ce que rien ne nous interdit de faire, et qu'on fait ensuite la somme, Paul obtient 2,5 et Julie obtient 2,3, donc Paul est "meilleur". On montre que la comparaison reste invariante si et seulement si les vecteurs des scores sont comparables (au sens de l'ordre produit direct).

On peut alors préférer une méthode de classement qui ne dépend pas d'une combinaison linéaire des scores et qui, si elle ne produit pas trop d'ex aequo, pourra être utilisée à la place de la méthode usuelle si le problème des pondérations se pose d'une manière ou d'une autre (en pratique, comme les gens qui sont classés ignorent ce type de choses et font confiance aux évaluateurs, le problème n'est pas "mis sur la table").

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